mercredi 10 juin 2015

Sénégal - La face cachée de la Lune

"Mon quotidien c'est la misère et la guerre" chantait Renaud dans Manhattan-Kaboul. Au Sénégal, il n'y a heureusement pas la guerre. Pour le reste par contre...

Triste contraste entre une nature magnifique et les abords des villes / villages et routes


L'envers du décor

A travers cet article, je vais te raconter mon quotidien au Sénégal. Je vais te raconter ce que je vis et ce que je vois chaque jour depuis un mois. Au-delà des jolies photos touristiques, des sourires d'enfants, et des paysages typiques d'Afrique, l'envers du décor est difficile, dur.

Le Sénégal est un pays du Sud en voie de développement. Autrement dit, il s'agit d'un pays "pauvre". Tu vas me dire que je ne t'apprends rien. Mais entre le savoir et le vivre, il y a un monde, un monde que j'aimerais te partager à travers des mots et en laissant ton imagination faire le reste.


Chapitre 1 - L'étape incontournable, l'aéroport Léopold Sédar Senghor de Dakar

Avant tout, revenons un peu en arrière. Nous sommes le 6 mai 2015, il est 16h00, heure locale. Je sors de l'aéroport de Dakar. Ma première impression, outre la chaleur, l'atmosphère lourde, chargée, la pollution des gaz d'échappement, et la fatigue du voyage, a été de me demander où j'avais atterri? Où je mettais les pieds?

Pas vraiment le temps de réfléchir, je suis immédiatement assailli par des chauffeurs de taxis, des personnes proposant du change et des "bagagistes" qui n'hésitent pas à me prendre mes bagages, presque de force, pour m'aider en échange d'un billet: welcome to Africa. Selbé m'attend au bout du couloir de grilles menant à la sortie de l'aéroport et c'est un véritable parcours du combattant que de repousser tous ces gens un à un en leur expliquant que je n'ai pas besoin d'aide, qu'on m'attend, ... 


Chapitre 2 - La pollution

Après 12 heures de trajet pour faire les quelques 470 kilomètres qui séparent Dakar de ma destination finale, j'arrive enfin à Tambacounda* et je découvre sa chaleur: accablante. Une véritable fournaise au soleil, 45°C et un vent chaud, brûlant, étouffant. Ici, dans cette ville de presque 100 000 habitants, je n'ai d'abord vu que la pauvreté et la pollution.

Cette pollution, non pas automobile comme à Dakar, mais physique avec la présence d’innombrables sachets, emballages divers, et autres déchets solides. En plus des déchets lourds et dangereux, énormément de voitures, de camions et d'engins de chantier sont abandonnés au bord des routes. Par endroit, j'ai l'impression de me promener dans une décharge à ciel ouvert. Et je ne te parle même pas des odeurs, parce qu'une grande quantité de déchets, additionnée à de grosses chaleurs... Je te laisse imaginer le résultat, un véritable désastre écologique!

"Paysage" typique de la ville et de ses abords

Je constate donc avec regret que ces tas d'immondices, ces saletés, ces ordures font partie intégrante du paysage et ne choquent plus personne.


Chapitre 3 - L'insalubrité

J'ai vu des enfants, des nourrissons et leurs mères assis sous un pont, en pleine heure de pointe à Dakar. Tout juste au niveau des sorties d'échappement des véhicules, ces groupes de personnes étaient là, à se reposer à l'ombre, à manger, à essayer de survivre.

J'ai vu des enfants à moitié nus, jouer et courir au milieu des ordures de la ville, barboter dans des flaques qui ressemblaient plus à de l'huile moteur qu'à de l'eau, prendre des bouteilles en plastiques qui traînent par terre et les mettre en bouche... En voyant ce genre de scène, tu comprends mieux pourquoi ces enfants ont un système immunitaire des plus performants.

Enfin, j'ai vu des animaux manger des sachets plastiques et autres papiers par manque de nourriture.


Au moins ici l'excuse du "c'est mon chien / mouton / âne qui l'a mangé" fonctionne!


Chapitre 4 - La pauvreté et la mendicité

Au-delà de la pollution et de l'insalubrité, il y a la pauvreté et les problèmes de sous-alimentation. A chaque fois que je suis dans une zone touristique ou proche du centre, je suis immédiatement en proie aux talibés et aux mendiants. Il s'agit d'enfants et d'adolescents en quête quotidienne de nourriture et d'argent pour leur propre survie et/ou pour l'entretien de leur marabout.

Ce phénomène est aussi repérable au niveau des carrefours, des marchés, des mosquées, des banques et autres endroits publics de la ville. Ainsi, je ne calcule plus le nombre de fois où j'entends "hé toubab, donne moi 100 francs" ou "donne moi un cadeau". Il s'agit d'un véritable problème social.


Chapitre 5 - La bêtise de l'Homme

Ici, je ne parlerai pas de racisme mais plutôt de bêtise dû à un manque d'éducation. Comme je le disais précédemment, les blancs sont appelés "toubabs" par les locaux. Les enfants t'interpellent constamment ainsi pour avoir un sourire, un bonjour, ou une pièce. Mais parfois, l'intonation n'est pas du tout amicale et te met vite mal à l'aise. Là, tu comprends que la personne n'attend ni un sourire, ni un bonjour mais veut t'afficher et te montrer du doigt en tant qu'étranger. Ceci s'ajouté au fait d'être tout le temps dévisagé, que ce soit dans la rue, en voiture, ... Heureusement, ces faits sont rares et on n'y fait très vite plus attention.

Une expérience particulière: En France, je suis considéré comme un expatrié. Mais sur le terrain, la réalité est tout autre. En effet, je suis bien immigré. Ce statut est assez particulier mais il me permet de mieux comprendre ce que peuvent vivre certaines populations étrangères installées en France (ou ailleurs dans le monde): une expérience intéressante, à vivre... Ou pas!

[ Je précise tout de même que ces "expériences" sont rares et qu'hormis les mots, il n'y a pas eu d'incident. De plus, je peux me promener dans les rues de Tambacounda à 01h00 du matin en toute sécurité - On n'est pas à Dakar où il vaut mieux éviter certaines promenades nocturnes ]


Chapitre 6 - La leçon de vie

Malgré tout ce que je viens de te raconter, avec ces conditions parfois à la limite du vivable, les gens restent souriants, avenants, ouverts et accueillants.

"En Europe vous avez les montres, ici on a le temps"

Les gens partagent et échangent avec toi, parce qu'ils ont du temps à te consacrer et que c'est leur manière d'être. Qui plus est, j'ai noté une grande solidarité au sein des familles et des amis, chose que nous avons perdu, oublié, dans notre société occidentale où le bien matériel a remplacé l'humain. 

Encore une fois, le sourire d'une personne te fait oublier tout le reste

En arrivant au Sénégal, je pensais "tout savoir sur tout"... Au final, j'ai pris une belle claque et ça m'a permis de recevoir une véritable leçon! C'est ainsi que je découvre, que je re-découvre la vie. En effet, aujourd'hui je pense que tu as davantage à apprendre de ce genre d'expérience, dans un pays en développement où les conditions de vies sont "différentes", loin de ce que tu connais et de ton confort, que dans tout autre pays du Nord où finalement ton quotidien ressemblera à ta routine habituelle.


Tambacounda* est la région la plus vaste du Sénégal mais avec une densité de population faible. Son économie quand à elle est la pire du pays. 

2 commentaires:

  1. Curieux qu'il fasse s'expatrier pour vraiment prendre conscience des maux de notre société, j'avais vécu une peu la même expérience lors de mon voyage en Chine... en tout cas j'ai parcouru ton blog et il y a de fabuleuses photos et récits ;) a++

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    1. Merci Fred!

      Oui, la réalité des choses est un peu triste. Il y a toujours un décalage entre le fait de connaître les problèmes et le fait de les vivre. D'où mon article "La face cachée de la Lune".

      A bientôt.

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