Résultats Trail de Bourbon 2022
30 ans du Grand Raid : J+1 [FINISHER TDB 2022]
Après 12 mois d’entrainement, de transpiration, de rigueur, de discipline, de sacrifice, de blessure, de frustration, de douleur, de doute, de stress, de démotivation, je suis arrivé au bout des 109 km et 6260 m de D+ du Trail de Bourbon !
Ils m’ont dit « fait péter » ; « tien bo, larg’ pas » ; « nous retrouv’ La Redoute », j’ai répondu « Alloooooons ! ». Détermination et concentration m’auront permis de réaliser un rêve un peu fou. Celui de terminer mon premier ultra-trail !
Sur 1321 coureurs engagés, 868 arriveront à franchir la ligne d’arrivée dans les 42 heures imparties. C’est donc avec une immense fierté que je boucle ce magnifique parcours en 27h33min28s (199è scratch).
Au-delà du résultat, anecdotique, l’aventure a été absolument incroyable ! Tout commençait pourtant assez mal. Le départ depuis Cilaos est décalé par la Direction de course de presque 1 heure en raison des problèmes d’acheminement des coureurs via les navettes. 20h55, l’hymne débute et la seconde vague dans laquelle je me trouve est enfin lâchée ! Les premiers kilomètres s’effectuent dans une ambiance de feu malgré des températures déjà fraiches pour le début de la nuit. Ensuite, première montée vers Caverne Dufour via le Bloc. Humidité, pluie, froid, boue et sol glissant…les conditions rêvées pour débuter. Je commence à prendre conscience de l’ampleur de la tâche qui m’attend. Sans compter sur le fait qu’une douleur au dos s’est réveillée avant le départ et j’éprouve des difficultés à m’alimenter en raison du stress. Cela rend ces 13 premiers kilomètres déjà bien compliqués.
PK25, ravitaillement à Hell-Bourg. Je suis 536è et j’accuse plus d’1h30 de retard sur mon estimatif. Je n’ai pas encore pris 1 minute de plaisir sur les 6h30 de course. Je n’avance pas, je ne rentre pas dans l’évènement, c’est dur, j’hésite à m’arrêter ici. Et puis, le mental, la fierté, l’égo, il se passe un truc. J’arrête la montre et laisse de côté le temps. Se relever et avancer. Je repars sur la route qui descend vers Bras-Marron. C’est roulant, il n’y a plus de trafic, je respire. J’attaque la montée vers Pleine des Merles : 1200 m de D+ sur 10 km, un bon morceau. Je suis concentré et je reprends les choses en main. Pendant un peu plus de 2 heures, je vais compter : 1 - 2 - 3. 1 - 2, respiration ; 3 expiration. Les jambes sont là, la tête aussi, les planètes commencent enfin à s’aligner pour moi. Les premières lueurs du jour me permettent d’apprécier un paysage à couper le souffle. Arrive doucement l’entrée dans le Cirque de Mafate, « mon » terrain de jeu ! On est sur le second tier de course et je vais prendre un plaisir absolument indescriptible pendant près de 40 km. Une véritable délivrance, je prends un rythme régulier, léger, et j’enchaine les montées, les descentes. Je suis bien. Vraiment bien. Comme un sentiment d’être là où il faut. J’espère que ces sensations vont durer le plus longtemps possible !
Avant de sortir de Mafate, je fais une vraie pause à Deux-Bras. Changement complet d’équipement, je fais le plein, je mange, je vois les podologues qui me réparent une ampoule et me soulagent de quelques échauffements sous les pieds. Je ferme les yeux 10 minutes avant d’attaquer le Mur de Dos d’Ane. Une difficulté que je n’appréhende plus, je maitrise l’ensemble des repères : la canalisation qui fuit, les morceaux de parcours à escalader, les échelles, les bambous et finalement les bruits du village. Ce sera ma 15è montée sur les 6 derniers mois. Chrono 1h10. A peine 15 minutes de plus qu’à l’entrainement et avec 71 kilomètres dans les jambes. Pas mal. Maintenant, je suis à la maison. La suite je la connais par cœur : Chemin Ratinaud, Kalla, La Possession. L’ambiance, le monde, la folie du Grand Raid, c’est génial. A partir de là, plus rien ne peut m’arriver…enfin, c’est ce que je pense. Je suis en train d’oublier le principal : rester humble.
Arrive le début de la seconde nuit et le fameux sentier des Anglais. Cassant. Physiquement et moralement cassant. La descente vers la Grande Chaloupe fait mal, très mal. Des coureurs sont couchés sur le côté du chemin, un autre vomi, encore. Certains sont brisés, vidés. Il me reste 15 kilomètres. La montée vers Saint Bernard se passe plutôt bien. Celle vers Colorado, moins. J’ai mal. Je n’y suis plus. Je n’ai plus d’énergie. Je sors de ma course, je regarde les messages de soutien, l’émotion me submerge. Mais pourquoi tu… A peine la question me traverse l’esprit que je me reconcentre. Non. Terminer sous les 30 heures estimées, ne pas craquer. On verra le reste plus tard. Finir sous les 30 heures, ça doit rester et ça restera ma dernière obsession. Au sommet du Colorado, il reste 5 kilomètres de descente technique vers le stade de La Redoute. Vers la délivrance. Ma frontale n’a plus de batterie…gros coup au moral. Je débute la descente avec un petit groupe et profite du halot de leur lumière. Ça ne va pas. Je décide donc d’allumer la lampe de mon portable. 19% de batterie, pourvu que ça tienne encore 1 heure. Le lendemain, je me rendrai compte que j’avais un jeu de piles dans la poche de mon sac. Manque de lucidité ? Stress ? Fatigue ? Bêtise ? On entend le speaker qui annonce les arrivées. Peu importe donc. Je n’ai plus mal.
Il y aura eu plus de 6 500 Fous sur les 4 courses du Grand Raid 2022. 6 500 histoires. Toutes uniques, belles, magiques. Que ce soit pour des motivations personnelles, collectives, solidaires, …chacun l’aura vécu à sa façon. J’ai eu la chance de prendre 110 km de pur plaisir. De terminer dans de bonnes conditions. C’est fou !
Félicitation à nous tous et à l’année prochaine !
Un grand merci au Grand Raid de la Réunion pour toutes les émotions. Merci aux équipes de bénévoles, aux équipes médicales, aux coureurs rencontrés sur les sentiers et à tous les spectateurs pour leurs encouragements sans faille ! Vous faites de cet évènement trail quelque chose d’unique au monde, de rare, de magnifique. J’en garde des étoiles plein les yeux (et quelques courbatures) !
Un immense merci aux collègues, aux copains et à la famille pour le soutien et les encouragements tout au long de l’aventure.
Une pensée toute particulière à Thib’s et Lucie qui étaient présents pour m’encourager au départ, à Célia qui m’a aidé à peaufiner ma préparation physique, à Dadane pour ses encouragements dans les 10 derniers kilomètres, à Jean-Philippe et Cyrille pour leurs précieux conseils, à Valérie pour la logistique d’avant départ et à Sylvette, Fabrice, Laurent et Tatiana pour leur soutien à l’arrivée. Evidemment, merci à Maman et Lulu, mes plus grandes supportrices, pour croire en moi, toujours et encore !
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